Les
convois de déportés vers la
Nouvelle-Calédonie
Nous
débutons ici une série
d’articles consacrés aux navires
qui ont effectué le transport des
déportés de la Commune
depuis la France
jusqu’en
Nouvelle-Calédonie. Pour cela nous avons utilisé
comme
sources les Archives
d’Outre-Mer à Aix-en-Provence (13), notamment la
série H30 qui regroupe les
dossiers de sept des premiers convois,
ainsi qu'un dossier "Divers",
contenant des pièces diverses.
Nous avons aussi
consulté
l’ouvrage
référence sur la déportation des
Communards :
Déportés et
forçats de la Commune : de Belleville à Nouméa,
par Roger
Pérennès,
Nantes, Ouest Editions, 1991. Enfin
nous avons consulté l’excellent site http://www.dossiersmarine.fr,
consacré à la flotte de Napoléon III, et sur lequel ont peut trouver tous les renseignements techniques
concernant les
navires, ainsi que des photos.
Au départ, la déportation des
forçats s'effectuait en Guyane. Mais un décret du 23 mars
1872, paru au Journal Officiel le 3 avril, désigne la
Nouvelle-Calédonie comme lieu de déportation. Ainsi les
Communards condamnés aux travaux forcés seront
internés à l'Île Nou, ceux condamnés
à la déportation en enceinte fortifiée seront
internés à la presqu'île de Ducos. Enfin ceux
condamnés à la déportation simple seront conduits
à l'île des Pins, où ils seront libres de leurs
mouvements, mais "assignés à résidence" si l'on
peut dire. Il sont cependant un peu traité comme des bagnards, puisqu'ils perçoivent le
paquetage
(peut-être moins les fers).
La marine française est en pleine
évolution depuis la Guerre de Crimée, avec le
remplacement progressif de la voile par la vapeur. Un décret de
1857 stipulant que tout navire non pourvu de machine cessera
d'être un navire de guerre. Ainsi des navires déjà
en constructions durent être transformés. On les coupa en
deux pour les allonger d'une quinzaine de mètres, afin de loger
les machines. Ainsi à partir de 1860, de nombreux vaisseaux
et frégates sont déclassés et
transformés en transport de troupes ou en
transport-écuries. Les canons sont enlevés, et les
sabords protégés par des grillages pour la
sécurité. Les batteries seront destinées au
logement des troupes transportées.
Fin août 1871, trois navires sont en armement à Brest,
quatre à Cherbourg, deux à Rochefort, et douze à
Toulon. A partir de septembre 1871, les premiers condamnés
à la déportation commencent à arriver dans les
ports, en attente d'embarquement pour la Nouvelle-Calédonie.
Selon le rapport Appert, au total 3846 Communards seront effectivement
déportés. Ce chiffre est cependant forcément faux, car les Conseils de
Guerre siègeront et condamneront jusqu'en 1879. Tous les déportés
n'arriveront pas en Nouvelle-Calédonie, car quelques uns
décèderont lors du voyage et seront
inhumés en mer, comme le sont les
marins. De mai 1872 à 1878, il y aura ainsi 20
convois qui se succèderont afin d'assurer le transport des
déportés vers la Nouvelle-Calédonie et l'Île
des Pins.
Pour ce qui est des itinéraires, trois possibilités avec
quelques variantes, s'offrent aux commandants : par le cap de Bonne
Espérance, par le cap Horn, par le canal de Suez. Les escales
étaient destinées au ravitaillement en produits frais et
surtout en eau douce.
L'itinéraire le plus utilisé sera celui emprunté
en 1500 par Pédro Alvares
Cabral
lors de son voyage aux Indes. Ainsi le navire part de Brest ou de l'
île
d'Aix. Il dirige vers les côtes du Sénégal et fait escale à l'île de
Gorée, face à
Dakar, ou bien aux Canaries.
Il se dirige ensuite vers le Brésil et fait escale à
l'île de Santa-Catarina,
puis sur
Cap Town en Afrique du Sud. Il descend ensuite
jusqu'aux îles Kerguelen,
puis sur le détroit de
Bass, entre l'Australie et
la Tasmanie, pour enfin arriver à
Nouméa, après un voyage de 16700 milles marins (30928
kms).
Le second itinéraire, après l'escale de Gorée, va
directement en Afrique du Sud en longeant les côtes
africaines par l'ancienne route des négriers, soit 13460 milles
marins (24928 kms).
Le troisième itinéraire est celui du cap Horn, avec
escales à Gorée et Santa Catarina, puis le détroit
de Magellan par Punta Arénas et remontait les côtes du
Chili jusqu' au Tropique du Capricorne avant de filer vers
Nouméa en longeant le tropique. Cet itinéraire
n'était praticable seulement pendant l'été austral
entre, fin novembre et mars, et représentait un périple
de 13200 milles marins (24446 kms).
Les autres itinéraires utilisaient le canal de Suez, mais furent
peu empruntés. Le départ se faisait de Rochefort ou de
Toulon, avec escales à Port Saïd, Singapour, puis le voyage
se continuait par le Wetar passage, dans la mer de Timor, puis le
détroit de Torrès, entre la Nouvelle-Guinée et
l'Australie, et enfin la Nouvelle-Calédonie. Cet
itinéraire était de 10611 milles marins (19652 kms)
à 12018 milles marins (22257 kms), selon que le départ se
faisait de Rochefort ou Toulon, et selon la variante
d'itinéraire.
-
Premier convoi, 5 mai 1872 - 29 septembre 1872, par la Danaé,
147 jours au départ de l'île d'Aix.
- Deuxième convoi, 13 juin 1872 - 2 novembre 1872, par la
Guerrière, 142 jours
au départ de Brest.
- Troisième convoi, 9 août 1872 - 5 novembre 1872, par la
Garonne, 88 jours au
départ de Rochefort.
- Quatrième convoi, 10 octobre 1872 - 9 février 1873, par
le
Var, 122 jours au départ de
l'île d'Aix.
- Cinquième convoi, 16 janvier 1873 - 4 mai 1873, par l'Orne,
109 jours au départ de Brest.
- Sixième convoi, 18 mai 1873 - 27 septembre 1873, par le
Calvados, 132 jours au
départ de l'île d'Aix.
- Septième convoi, 10 août 1873 - 8 décembre 1873,
par la Virginie, 120 jours au
départ de l'Île d'Aix.
- Huitième convoi, par la
Sibylle le 1er février 1874, puis
9 avril 1874 - 9 août
1874, par l'Alceste, 122
jours au
départ d'Arzew (Algérie).
- Neuvième convoi, 9 juin 1874 - 16 octobre 1874, par la Loire,
129 jours au départ de l'île d'Aix.
- Dixième convoi, 29 août 1874 - 4 janvier 1875, par la
Virginie,
128 jours au départ de Brest.
- Onzième convoi, 5 septembre 1874 - 18 janvier 1875, par le
Calvados, 135 jours au
départ de l'île d'Aix.
- Douzième convoi, 5 décembre 1874 - 12 mars 1875, par la
Garonne, 97 jours au
départ de l'île d'Aix.
- Treizième convoi, 5 mars 1875 - 23 juillet 1875, par le Var,
140 jours au départ de l'île d'Aix.
- Quatorzième convoi, 4 juin 1875 - 22 septembre 1875, par
l'Orne, 110 jours au départ de
l'île d'Aix.
- Quinzième convoi, 6 septembre 1875 - 30 janvier 1876, par le
Rhin, 146
jours au départ de l'île d'Aix.
- Seizième convoi, 17 mars 1876 - 21 juin 1876, par la Loire, 96
jours au départ de l'île d'Aix.
- Dix-septième convoi, 1er août 1876 - 6 janvier 1877, par
le Navarin,
158 jours au départ de l'île d'Aix.
- Dix-huitième convoi, 28 décembre 1876 - 22 avril 1877,
par le Tage, 115 jours au
départ de l'île d'Aix.
- Dix-neuvième convoi, 11 octobre 1877 - 24 janvier 1878, par le
Navarin, 105 jours au
départ de l'île d'Aix.
- Vingtième convoi, 15 juillet 1878 - 25 octobre 1878, par la
Loire, 102 jours au départ de
Rochefort.
Parmi les communards, il faut distinguer 3 catégories. Nous tiendrons
compte ici des seuls chiffres du rapport Appert. Il y a un nombre assez
restreint de condamnés aux travaux forcés envoyés purger leur peine au
bagne de l'île Nou (environ 150). On a ensuite les condamnés à la
déportation en enceinte fortifiée (environ 1200), qui purgeront la leur
sur la presqu'île Ducos. Enfin pour la majorité, condamnés à la
déportation simple, ce sera l'île des Pins (environ 3400).
Pour les communards originaires du Finistère,
vous pouvez consulter le site de Patrick Milan,
pour ceux originaires d'Arcueil (Val-de-Marne), vous pouvez consulter le site
d'Annie Thauront,
avec également un article sur le député de la Guadeloupe
Melvil-Bloncourt,
condamné à mort pour sa participation à la Commune.
Certains articles comportent la liste
des condamnés (à terme, toutes les listes de condamnés seront mises en ligne).
Possédant un exemplaire du livre de Roger Pérennès
et les photos numériques des dossiers des huit premiers convois
en taille 1600 x 1200, j'ai donc des renseignements succincts sur
chacun d'eux, et peux donner la marche à suivre pour les
recherches et les lieux de conservation de leurs dossiers individuels.
Pour cela, me contacter ici.
Je précise que mon aide est totalement bénévole !
Les photos de cet articles ont été glanées sur Internet, une provient de la Bnf, et une a été envoyée par Chantal Kroliczak.