Note individuelle
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Jean Guitton naît dans une famille catholique de la bourgeoisie stéphanoise : catholique traditionnel du côté paternel, et catholique humaniste du côté maternel, son grand-père maternel faisant preuve d'agnosticisme. Cette diversité dans les expressions de la foi marque l'originalité de sa pensée.
Élève au Lycée de Saint-Étienne, il y fait de brillantes études qui le mènent à l'École Normale Supérieure de la rue d'Ulm (promotion 1920). Il y obtient l'agrégation de philosophie en 1923 et devient docteur ès lettres en 1933. Il obtient l'une de ses premières affectations au Lycée Théodore de Banville à Moulins (03), ancienne capitale du duché de Bourbonnais, où il avait de solides racines bourbonnaises à Saint-Pourçain-sur-Sioule. Sa thèse porte sur Le Temps et l'éternité chez Plotin et saint Augustin. Il enseigne au lycée pendant plusieurs années avant d'être nommé à l'université de Montpellier en 1937.
Durant la Seconde Guerre mondiale, il est prisonnier de guerre à l'Oflag IV D (Elsterhorst). La captivité est pour lui l'occasion d'écrire et de publier un essai métaphysique et politique sur l'identité française : Fondements de la communauté française. Dans cet ouvrage, préfacé par le maréchal Pétain à qui est dédié le texte, Jean Guitton propose de redonner à la «France nouvelle» qu'il pense voir naître depuis la Défaite, une «mystique» qui réussirait la synthèse du meilleur de l'Ancien Régime et de la Révolution française. Son Journal de captivité 1942-1943 se fait aussi l'écho de ses préoccupations politiques : il y raconte, entre autres choses, son engagement dans le «Cercle Pétain» du camp, où il donne des conférences et organise des rencontres entre officiers français et allemands. Plusieurs pages du Journal sont publiées, dès le 7 mars 1943, dans l'hebdomadaire pétainiste Demain, dont la mission était de rassembler les catholiques de tous bords autour du maréchal Pétain.
Ami intime de Mgr Montini, futur pape (Paul VI), il est protégé des rigueurs de l'Index. Il est appelé par Jean XXIII à participer comme simple laïc au concile Vatican II. Parallèlement, il continue de publier des œuvres philosophiques et apologétiques, qui en ont fait l'un des plus grands penseurs catholiques du XXe siècle.
Il contribue d'autre part à faire connaître Marthe Robin (voir son livre Portrait de Marthe Robin) qu'il allait voir fréquemment et à qui il demande conseil avant de se présenter à l'Académie Française.
En 1955, il est nommé à la chaire de la philosophie à la Sorbonne, en dépit de l'opposition revancharde de Vladimir Jankelevitch et de Jean Wahl qui y voient le retour du Pétainisme. Il est élu le 8 juin 1961 à l'Académie française, au fauteuil de Léon Bérard (1876-1960). Le philosophe marxiste Louis Althusser qui fût son élève et qui l'admirait vient le voir secrétement de nuit à plusieurs reprises en mai 1968 pour dialoguer avec lui (Il le confia lors d'une conférence qu'il fit devant le corps professoral en 1970 à l'Institut Catholique pour répondre au livre de Raymond Aron : Marxismes imaginaires).En 1987, c'est au tour de l'Académie des sciences morales et politiques de lui ouvrir ses portes, au fauteuil de Ferdinand Alquié.
Jean Guitton a été désigné par Bergson au côté de Vladimir Jankélévitch comme héritier de sa pensée. Voir dans "Un siècle une vie" 1988, le chapitre sur "L'évolution créatrice" et le chapitre sur Bergson. Dans le même ouvrage voir aussi les chapitres sur Althuser, Camus, Daniel Halévy...
Il continue d'écrire jusqu'à la fin de sa vie. En 1984, il fait part de ses réflexions sur la mort et l'au-delà dans L'Absurde et le Mystère, à la suite de discussions avec le président de la République François Mitterrand, alors atteint d'un cancer. En 1991, il est victime d'une affaire de plagiat. L'astrophysicien Trinh Xuân Thuân accuse les frères Bogdanoff d'avoir plagié son livre La Mélodie secrète (1988) pour leur livre d'entretien avec Guitton intitulé Dieu et la science. Le procès qui s'ensuit lave ces accusations.
Pratiquant la peinture depuis son enfance, Jean Guitton a notamment peint un Chemin de croix pour l'église Saint-Louis-des-Invalides. Pour chaque station, pour chaque arrêt en ce chemin, Jean Guitton a réalisé une «toile» - une icône - sur laquelle il a écrit une courte phrase que la peinture éclaire et qui révèle ce qu'il a peint.
Peintre de talent, il est accompagné et encouragé par le peintre Édith Desternes, qui avait elle aussi de solides attaches bourbonnaises à Moulins (03), à produire et exposer régulièrement ses œuvres à la Galerie Katia Granoff - Paris.
Jean Guitton est mort en 1999, à 97 ans. Marié sur le tard, il n'avait pas d'enfants. Son frère, Henri Guitton, devint un économiste réputé.
(Source : voir fichier Geneanet de Jean Colin de Verdière).
En 1951, le philosophe Jean Guitton (1901-1999) publiait Le Travail intellectuel, un petit livre dans lequel il prodigue ses conseils, simples et directs, à « ceux qui étudient et à ceux qui écrivent ».
Tout commence par un curieux hymne au dépouillement intellectuel. L'auteur raconte que durant la Seconde Guerre mondiale, qu'il a passée prisonnier dans un camp, il fut longtemps privé de livres. Or, loin d'être un handicap, ce fut pour lui un avantage ! Quand on est entouré de trop de livres ou de journaux, on se disperse, alors qu'une certaine frugalité intellectuelle a ses vertus : « Notre civilisation sursaturée de connaissances et de moyens de savoir offre tant de masques et de faux appuis que l'homme ne sait plus ce qu'il sait et ce qu'il ignore. » Cet hymne à une simplicité volontaire appliquée au domaine de l'esprit a de quoi surprendre de la part d'un homme de culture et auteur prolixe. Mais elle sonne étonnamment juste à une époque de surabondance informationnelle. « Trop d'information tue l'information », dit-on : J. Guitton anticipe et soutient après Montaigne qu'une tête trop pleine finit par obscurcir la pensée.
Un peu plus loin, J. Guitton prend un autre chemin inattendu : il suggère de regarder travailler les autres - ouvriers, artisans, artistes ou militaires. Chaque profession a développé des aptitudes propres susceptibles d'être utiles dans un domaine de l'esprit. Ainsi l'« homme de guerre » doit livrer bataille, combattre, se préparer à la souffrance et même au pire ; il doit s'entraîner, préparer ses plans de bataille avec méthode, mais doit aussi intégrer l'inattendu. Mais l'alliance d'un entraînement rigoureux et l'acceptation de l'imprévu ne devrait-elle pas autant valoir pour le monde de l'esprit que pour l'art du combat ?
Plus loin encore, J. Guitton raconte son expérience de jeune professeur. Au lieu de raturer les copies au stylo rouge, il signalait à chaque élève deux points principaux. Il montrait d'abord une erreur, une seule, mais que l'élève ne devait plus jamais commettre !
«Je prenais l'élève à part pour lui enseigner la règle violée et je ne permettais guère qu'elle le fût encore». Mais il encadrait aussi un passage que l'élève avait bien réussi en l'encourageant à exploiter cette bonne voie afin « qu'il prenne conscience de son pouvoir et qu'il sache s'imiter lui-même dans les meilleurs moments ».
Sur l'art de s'organiser, J. Guitton, invite l'étudiant à distinguer trois périodes dans son emploi du temps : la préparation, l'exécution et le repos. La tendance courante est de mélanger ces temps. Or le temps de l'effort, du travail intensif et productif est limité (« le temps du vrai travail est court »). Traîner et travailler longtemps sur une même tâche est mauvais signe. Le brouillage des temps rend le travail peu efficace, favorise la dispersion et la flânerie. J. Guitton présente à sa manière la loi des « 20/80 » qui veut que le temps de travail vraiment efficace ne dure que 20 % du temps (pendant lequel on fait 80 % du travail). Une fois cette séquence de travail intensif passée, il faut savoir se reposer.
Cette « règle d'or » du travail intellectuel peut se traduire ainsi : « Ne tolère ni de demi-travail ni de demi-repos. Donne-toi tout entier ou détends-toi absolument. Qu'il n'y ait jamais en toi de mélange des genres».
Ce moment de travail intense et exclusif, il faut savoir le choisir, il doit être annexé : ce sont ces « heures royales de la journée » où l'on est au mieux de sa forme. Ici J. Guitton fait de la chronobiologie avant l'heure.
La préparation des lieux est également déterminante. Il faut se construire un « nid de travail », veiller à ce qu'il ne soit pas trop encombré : un bureau où tout s'accumule est un signe de dispersion et de manque de rigueur dans la gestion de son travail.
Auteur d'une œuvre abondante (une soixantaine de livres à son actif), Jean Guitton sait de quoi il parle quand il donne ?ses conseils d'écriture.
Tout commence avec la prise de notes, la molécule de base de tout texte. Prendre des notes, c'est là que commence l'écriture. Une note exprime une idée, un fait ou une expression qui surgit au fil de nos observations, nos lectures. Pour être utile, cette note doit respecter une règle : la lisibilité. Une note n'est pas une simple formule grossière crayonnée à la hâte. Elle qui est faite de phrases construites et pourrait être relue et comprise par un autre. À ce titre, la note suppose la précision de l'idée et la clarté de l'expression. Ces qualités permettront une ré-exploitation ultérieure. J. Guitton suggère ensuite de transformer ses notes en fiches, puis de classer ses fiches autour de thèmes (J. Guitton qui écrivait à une époque sans ordinateur). Les notes vont servir à construire des paragraphes, qui sont les briques de l'œuvre. J. Guitton propose donc une petite « théorie du paragraphe » fondée sur les principes suivants. Un paragraphe est une unité de sens (de 15 à 25 lignes) correspondant à une idée, un récit ou un fait. Écrire, c'est donc toujours écrire des paragraphes, organisés autour d'une idée unique. « L'esprit est volage. (…) Pour se faire comprendre, il faut donc décomposer, ne dire qu'une chose à la fois. » Mieux, il ne faut pas hésiter à se répéter et, pour enfoncer le clou, annoncer l'idée, l'exposer, puis à la rappeler. Autrement dit, « on dit qu'on va le dire, on le dit et on dit qu'on l'a dit».
La vertu des modèles
Concernant le plan général, J. Guitton n'est pas un partisan des découpages tracés d'avance selon un ordre logique (son livre en est le témoignage).
Tous les auteurs - d'essais, de thèses, de roman - le savent : le plan est toujours un casse-tête. Car ni la réalité, ni nos idées n'épousent parfaitement un ordre rigoureux. Le plan aide donc à structurer la lecture, pas à refléter le réel ou l'ordre de ses propres idées. Il faut en prendre son parti et se résoudre à faire un choix parmi d'autres car il y a toujours mille plans possibles et aucun n'est idéal. Au plan bien structuré, J. Guitton préfère donc un « axe », un fil directeur exprimant la dynamique d'une pensée.
Pour la forme comme pour le style, J. Guitton croit en la vertu des modèles. Il cite à ce propos Stendhal qui, paraît-il, composait ?ses livres en partant d'une histoire déjà écrite et en y insérant ses propres développements. Une forme de plagiat ? Le reproche a été fait à Stendhal. Mais J. Guitton réfute l'accusation. « Cette observation paraîtrait méchante si le lecteur cédait à l'hypocrisie commune, qui veut qu'un ouvrage de l'esprit n'emprunte pas. Mais nous savons assez que l'œuvre d'art est souvent une habile transposition, enrichie de plusieurs différences où le génie a mis sa marque».
Le 5 octobre 2012 par Jean-François Dortier
Source : (http://www.dortier.fr).
Élève au lycée à Saint-Étienne dès la classe de huitième, il part à Paris en octobre 1917 et est logé chez les pères maristes pendant ses études au lycée Louis le Grand et à la Sorbonne. Professeur de lycée, d'université puis à la Sorbonne. Philosophe, élu à l'Académie Française au fauteuil de Léon Bérard, le 8 juin 1961. Commandeur de la Légion d'honneur, Grand-croix de l'ordre national du Mérite, Commandeur des Arts et des Lettres. Prisonnier de guerre, il a écrit Journal de captivité. Il a également dessiné et peint. Comme on lui proposait une rue à son nom de son vivant, ce disciple de Bergson a demandé qu'elle soit proche de la rue Bergson. La municipalité a fait mieux, les allées Guitton ont remplacé l'allée Bergson le 18/10/1986.
Il est inhumé dans une chapelle privée qu'il avait fait construire dans le hameau de Deveix à Champagnat (Creuse), aux côtés de son épouse Marie Louise Bonnet décédée à Nice le 18/01/1974. Sa sépulture est presqu'en face du château de Fournoux où, enfant, il passait ses vacances avec son grand-père maternel au bord de la vallée où coule la Tardes.
Source : (http://noms.rues.st.etienne.free.fr).
Jean Guitton naît au sein d'une famille catholique de la bourgeoisie stéphanoise : catholique traditionnel du côté paternel, et catholique humaniste du côté maternel (Par ailleurs, la mère de Jean Guitton était originaire de Champagnat, dans la Creuse), son grand-père maternel faisant preuve d'agnosticisme. Cette diversité dans les expressions de la foi marque l'originalité de sa pensée. Son frère, Henri Guitton (1904-1992), devint un économiste très réputé. Il est le cousin du poète Jean Desthieux.
Élève au Lycée de Saint-Étienne, il y fait de brillantes études qui le mènent à l'École normale supérieure de la rue d'Ulm (promotion 1920). En 1921, il rencontre Jacques Chevalier qui fut pour lui son premier maître (Voir dans Un siècle, une vie 1988, p. 430, le chapitre sur Jacques Chevalier), il lui fit découvrir le Père Pouget, Lord Halifax. Jacques Chevalier le convainc au bout d'un an de quitter la section des lettres pour la philosophie. Il y obtient alors l'agrégation de philosophie en 1923 et devient docteur ès lettres en 1933. Il obtient l'une de ses premières affectations au lycée Théodore-de-Banville à Moulins (Allier) ; Jean Guitton avait de solides racines bourbonnaises (à Saint-Pourçain-sur-Sioule). Sa thèse porte sur Le Temps et l'éternité chez Plotin et saint Augustin. Il enseigne au lycée pendant plusieurs années avant d'être nommé à l'université de Montpellier en 1937.
Durant la Seconde Guerre mondiale, il est prisonnier de guerre à l'Oflag IV-D (Elsterhorst). La captivité est pour lui l'occasion d'écrire et de publier un essai métaphysique et politique sur l'identité française : Fondements de la communauté française (Fondements de la communauté française, Lyon, Plon, coll. "Cahiers des captifs", no 1, 1942). Dans cet ouvrage, préfacé par le maréchal Pétain à qui est dédié le texte, Jean Guitton propose de redonner à la «France nouvelle» qu'il pense voir naître depuis la Défaite, une «mystique» (II, 3) qui réussirait la synthèse du meilleur de l'Ancien Régime et de la Révolution française (Jean-Louis Clément, Les évêques au temps de Vichy : loyalisme sans inféodation : les relations entre l'Église et l'État de 1940 à 1944, Paris, Beauchesne, coll. «Bibliothèque Beauchesne»,ý 1999, p. 101-102). Son Journal de captivité 1942-1943 (Journal de captivité 1942-1943, Paris, Montaigne, 1943 ; réédition sous le titre Pages brûlées. Journal de captivité 1942-1943, Paris, Albin Michel, 1998) se fait aussi l'écho de ses préoccupations politiques : il y raconte, entre autres choses, son engagement dans le «Cercle Pétain» du camp, où il donne des conférences et organise des rencontres entre officiers français et allemands (Ibid., 1998, p. 31 et 130-131). Plusieurs pages du Journal sont publiées, dès le 7 mars 1943, dans l'hebdomadaire pétainiste Demain, dont la mission était de rassembler les catholiques de tous bords autour du maréchal Pétain (Gisèle Sapiro, La Guerre des écrivains 1940-1953, Paris, Fayard, 1999, p. 55). La publication du Journal lui vaut une condamnation devant un tribunal pour «intelligence avec l'ennemi et aide à la propagande allemande» (Cf. Guillaume Gros, Philippe Ariès : un traditionaliste non-conformiste : de l'Action française à l'École des hautes études en sciences sociales, 1914-1984, Villeneuve d'Ascq, Presses Universitaires du Septentrion, coll. « Histoire et Civilisations »,ý 3 avril 2008, p. 137). Le jugement a été cassé par le Conseil d'État en 1948 ou 1949 (Jean Guitton, Un siècle une vie, Paris, Robert Laffont, 1988, ch. III, p. 328).
Pendant sa période de détention, Jean Guitton organise des cours sur la pensée de Bergson, dont nul n'ignorait qu'il était juif. «Il va sans dire que mon enseignement était particulièrement écouté par les officiers allemands. Le Sonderführer était venu me dissuader de poursuivre ce cours dangereux pour moi». Après que l'ambassadeur allemand à Paris, Abetz, lui eut donné une autorisation exceptionnelle de libération à cause de sa limite d'âge, ce même Abetz expliqua ensuite que sa libération était impossible car il avait fait en captivité des cours sur le juif Bergson. Guitton, toutefois, demeura positif : «Il m'arriva souvent de me dire avec satisfaction que je souffrais pour Israël» (Un siècle, une vie, Robert Laffont, 1988, p. 137-138, Chapitre 3, «Bergson»).
Ami intime de Mgr Montini, futur pape (Paul VI), il est protégé des rigueurs de l'Index. Il est appelé par Jean XXIII à participer comme simple laïc au concile Vatican II. Parallèlement, il continue de publier des œuvres philosophiques et apologétiques, qui en ont fait l'un des plus grands penseurs catholiques du XXe siècle. Jean Guitton a aussi été désigné par Bergson au côté de Vladimir Jankélévitch comme héritier de sa pensée (Voir dans Un siècle une vie 1988, le chapitre sur "L'évolution créatrice" et le chapitre sur Bergson. Dans le même ouvrage, voir aussi les chapitres sur Althusser, Camus, Daniel Halévy, etc).
Il contribue d'autre part à faire connaître la mystique française Marthe Robin (voir son livre Portrait de Marthe Robin) qu'il allait voir régulièrement (Jean Guitton écrit, à propos de Marthe Robin : «Plus de cent mille personnes (…) ont défilé dans votre petite chambre. Et moi, j'y suis venu bien des fois puisque je crois vous avoir vue pendant vingt-cinq ans, et chaque année une heure». Citation extraite de Lettres ouvertes, Jean Guitton, Lettres ouvertes, Paris, Payot & Rivages, coll. «Bibliothèque scientifique»,ý 1993, 248 p) et à qui il demande conseil avant de se présenter à l'Académie française.
Soutenu par Gabriel Marcel, il est nommé en 1955 à la chaire de philosophie à la Sorbonne, en dépit de l'opposition de Vladimir Jankélévitch et de Jean Wahl qui y voient le retour du pétainisme. Il est élu le 8 juin 1961 à l'Académie française, au fauteuil de Léon Bérard (1876-1960). Le philosophe marxiste Louis Althusser, qui fut son élève et qui l'admirait, vient le voir secrètement de nuit à plusieurs reprises en mai 1968 pour dialoguer avec lui (Il le confia lors d'une conférence qu'il fit devant le corps professoral en 1970 à l'Institut catholique pour répondre au livre de Raymond Aron, Marxismes imaginaires : d'une sainte famille à l'autre, Paris, Gallimard, coll. «Folio essais»,ý 1998). En 1987, c'est au tour de l'Académie des sciences morales et politiques de lui ouvrir ses portes, au fauteuil de Ferdinand Alquié.
Il continue d'écrire jusqu'à la fin de sa vie. En 1984, il fait part de ses réflexions sur la mort et l'au-delà dans L'Absurde et le Mystère, à la suite de discussions avec le président de la République François Mitterrand, alors atteint d'un cancer. En 1991, il est victime d'une affaire de plagiat. L'astrophysicien Trinh Xuân Thuân accuse les frères Bogdanoff d'avoir plagié son livre La Mélodie secrète (1988) pour leur livre d'entretiens avec Guitton intitulé Dieu et la science (Hervé Morin, «La réputation scientifique contestée des frères Bogdanov», Le Monde, 19 décembre 2002).
Pratiquant la peinture depuis son enfance, il y est fortement conduit et encouragé par Édith Desternes, peintre aux résidences parisienne et charitaine, comme lui aux racines bourbonnaises très fortes (à Moulins et au Veurdre), et qui l'invite à exposer régulièrement ses œuvres à la Galerie Katia Granoff de Paris. Guitton a notamment peint un Chemin de croix pour l'église Saint-Louis-des-Invalides : pour chaque station, pour chaque arrêt en ce chemin, il a réalisé une «toile» - une icône - sur laquelle il a écrit une courte phrase que la peinture éclaire et qui révèle ce qu'il a peint. Jean Cocteau l'a aussi incité à décorer la chapelle des Prémontrés à Rome, puisque saint Gilbert, patron du Bourbonnais, avait fondé un monastère relevant de l'ordre des Prémontrés près de Saint-Pourçain-sur-Sioule (Dictionnaire des Philosophes, P.U.F., 1984, p. 1112).
Jean Guitton est mort en 1999, à 97 ans. Marié sur le tard à Marie-Louise Bonnet (1901-1974), il n'avait pas d'enfants.
Il est évoqué dans le 155e des 480 souvenirs cités par Georges Perec dans Je me souviens.
Récompenses : 1954 : Grand prix de l'Académie française, 1979 : Médaille d'or Montaigne, 1986 : Commandeur de la Légion d'honneur, 1990 : Grand-croix de l'ordre national du Mérite, Commandeur des arts et des lettres (Le Figaro, 2 avril 1977 et 19 avril 1979).
Œuvres (liste partielle) : Portrait d'une mère (1933), Le Temps et l'éternité chez Plotin et Saint Augustin (1933), La Philosophie de Leibniz (1933), Actualité de saint Augustin (1935), La Pensée moderne et le catholicisme (1934-1950), Perspectives (1934), Newman et Renan (1938), La Pensée de M. Loisy (1936), Critique de la critique (1937), Le Problème de la connaissance t de la pensée religieuse, Le Problème de Jésus et le fondement du témoignage chrétien (1946), Développement des idées dans l'Ancien Testament (1947), Portrait de M. Pouget (1941), Justification du temps (1942), Fondements de la communauté française (1942), Journal de captivité 1942-1943 (1942-1943), Nouvel art de penser (1946), Le Problème de Jésus (1946), L'Amour humain (1948), L'Existence temporelle (1949), La Vierge Marie (1949), Pascal et Leibniz (1951), Le Travail intellectuel (1951), Journal, études et rencontres (1959 et 1968), L'Église et l'Évangile (1959), La Vocation de Bergson (1960), Une mère dans sa vallée (1961), Regard sur le concile (1962), Génie de Pascal (1962), L'Église et les laïcs (1963), La conversion de Ratisbonne (1964), Le Clair et l'Obscur (1964), Dialogues avec Paul VI (1967), Développement de la pensée occidentale (1968), Profils parallèles : Newman et Renan, Pascal et Leibniz, Teilhard et Bergson, Claudel et Heidegger (1970), Ce que je crois (1971), Paul VI et l'Année sainte (1974), Écrire comme on se souvient (1974), Remarques et réflexions sur l'Histoire (1976), Journal de ma vie (1976), Évangile et mystère du temps (1977), L'Évangile dans ma vie (1978), Paul VI secret (1980), Le Temps d'une vie (1980), Jugements (1981), Pages brûlées (1984), L'Absurde et le Mystère (1984), Portrait de Marthe Robin (1985), Œcuménisme (1986), Un siècle, une vie (1988), 13e Prix Fondation Pierre-Lafue 1989, Dieu et la science (avec Igor et Grichka Bogdanoff, 1991), Portrait du père Lagrange (1992), Celui qui croyait au ciel et celui qui n'y croyait pas (avec Jacques Lanzmann, 1994), Lumen de lumine (1994), Chaque jour que Dieu fait (1996), Le Siècle qui s'annonce (1996), Mon testament philosophique (1997), Ultima Verba (avec Gérard Prévost, 1998), Le livre de la sagesse et des vertus retrouvées (1998).
(Source : Encyclopédie en ligne Wikipédia).
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