Armand G..., fils de prisonnier de guerre
une histoire d'amour entre un prisonnier français et une polonaise
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Préambule : Cette histoire débute en 2006
lorsqu'une américaine d'origine polonaise, cherchant à retrouver
son grand-père, et ayant par hasard consulté mon site, m'adressa
un message, sorte de "bouteille à la mer". Elle croyait qu'il
s'appelait Guinard, hors c'est Guignard. Elle savait seulement que ce
français, avait été prisonnier de guerre en Allemagne
où il avait rencontré une jeune polonaise. De cette union
était né un fils, son père.
Emu par cette histoire touchante,
je m'efforçais de l'aider de mon mieux dans sa quête.
Une telle histoire soulevait de
nombreux problèmes d'ordre moral. En effet notre prisonnier était
marié et avait un enfant lorsque la guerre éclata. A la
libération il est revenu en France. Mais a-t-il repris une vie
"normale",… A-t-il divorcé?... Sa femme et son enfant
furent-ils au courant de cette "histoire allemande"?... Cette polonaise
et son enfant, que sont-ils devenus ?...
Je ne pense pas que la femme et
le fils de notre prisonnier de guerre aient eu connaissance de cette
« histoire allemande », car ils auraient peut-être
essayé de retrouvé cet enfant et demi-frère… D'autre
part si divorce il y avait eu, Armand aurait peut-être essayé de
retrouver son amie polonaise et son fils… J'avais enfin pensé
à essayer de retrouver les descendants français de ce prisonnier,
mais je n'ai pas osé à l'époque, car je ne sais pas
comment ils auraient réagi s'ils découvraient cette histoire …
Ce sont toutes des questions
auxquelles je n’ai pas trouvé de réponses, réponses
que je n’ai d’ailleurs pas cherchées !... Car elles
soulèvent un certain nombre de problèmes de conscience.
Mais qui sommes nous pour
juger?... Comment aurions nous réagi dans les mêmes conditions et circonstances?...
Sommes-nous responsables des actes de nos parents ou grands-parents, ou de nos
ancêtres plus lointains?...
Ce qui s'est passé dans ce
cas précis n’est ni pire ni mieux que certaines histoires d'amour
entre françaises et soldats allemands pendant l'occupation... Il y en a
pourtant eu beaucoup plus que l'on ne le pense!... Mais c'est un tabou d'en
parler et ces enfants ont été et sont encore
considérés comme des enfants de la honte ! L'amour est pourtant
un sentiment tout à fait honorable et humain!…
Les soldats allemands n'étaient
pas plus sûrs de revoir leur pays que nos prisonniers. Les premiers
devaient effectuer un certain temps en France, avant de repartir souvent
ailleurs faire la guerre, d'où ils ne reviendraient peut-être pas
vivants. Quant à nos prisonniers, ils ne savaient pas quand ils
reverraient leur pays, car ils devaient pour cela attendre la fin de la guerre
et leur libération. Pour bon nombres de prisonniers français, la
vie dans certains commandos de travail n'était pas trop
désagréable si on avait la chance de tomber dans un "bon
kommando", où ils étaient considérés comme des
êtres humains, travaillant de force certes, mais comme de vrais
êtres humains, contrairement à leurs camarades vivant dans les
camps de prisonniers.
Faut-il interpréter cette
histoire comme un message d’espoir face à l’horreur de la
guerre?... Si la guerre n’avait pas eu lieu, Armand n’aurait pas
été prisonnier, comme tant d’autres, et tout ceci ne serait
certainement pas arrivé…
Après bien des années de réflexion, et malgré toutes ces interrogations "éthiques", j’ai pris la décision d’écrire cet article. Il me semble en effet que ce prisonnier et cette polonaise ont vécu somme toute une belle histoire d'amour… Par mesure de sauvegarde de la vie privée, j’ai cependant volontairement omis le nom de cette polonaise et de son fils, bien que je possède deux photos d’Armand et de sa fille. Seul le nom du père, le prisonnier de guerre français, est mentionné et ce pour deux raisons. La première des raisons est que cet enfant de la honte aurait été assez facilement identifiable. La seconde est que ce militaire est né il y a plus de 100 ans, et qu’il est décédé depuis plus de 25 ans ce qui, légalement, ne représente aucune atteinte à son image ou à sa vie privée.
Du 10 au 14 janvier 1924, il est
en mer afin de rejoindre son unité au Maroc. Il arrive dans son
régiment le 28 janvier 1924 comme soldat de 2ème
classe, puis est promu au grade de caporal le 25 juin. Il passe au 1er
régiment de Zouaves le 5 juillet 1924. Par ordre général
n° 70 du 4 septembre 1925, Armand Guignard est cité à l'ordre
de la Région de Fez pour le motif : Chef
de groupe s'est particulièrement par sa belle attitude au feu pendant
les combats du 13 au 15 mai 1925, en entrainant son groupe à l'assaut
des crêtes fortement battues par les feux ennemis. Cette citation obtenue
lors de la Guerre du Rif, lui vaut attribution de la Croix de
Guerre Territoire des Opérations Extérieures.
Rappelons que la Guerre du Rif
opposait depuis 1921 les tribus du Rif, région au nord-est du Maroc, aux
espagnols. Les français interviennent en 1915, en vertu des accords de
protectorat passés avec le sultan du Maroc, mais aussi pour
éviter la contagion au reste du Maroc, alors sous influence
française.
Du 1er au 6 janvier
1926, il est en mer, puis au C.F.C. (Congé de fin de campagne) du 6
janvier au 14 juin 1926. Il est de nouveau en mer du 15 au 19 juin. A partir du
20 juin 1926 il est de nouveau au Maroc. Le 5 juillet 1927 il passe au 1er
régiment de Zouaves, basé à la caserne
Liautey à Casablanca.
Le 1er janvier 1927, il est promu sergent, puis admis dans le corps des sous-officiers de carrière le 26
décembre 1928. Après avoir été promu sergent-chef
le 16 mai 1931, il est autorisé à effectuer un second
séjour de 2 ans au Maroc à compter du 20 décembre de la
même année. Rapatriable en Métropole le 22 mai 1934, il
embarque à Casablanca le même jour et, à son arrivée
le 24 mai, est affecté au 121ème régiment
d'Infanterie, de nouveau en C.F.C. du 25 mai au 19 octobre 1934. Par
décret du 11 juin 1937, Armand Guignard est décoré de
Lorsque la guerre éclate,
Armand est, au 121ème régiment d'Infanterie basé
à Montluçon (Allier), dans les locaux de la caserne
Richemont. Il porte le matricule 1346
et est à la 2ème compagnie du
régiment. Lors de l'ordre général de mobilisation, son
centre de mobilisation est tout naturellement le centre de Montluçon,
où il est placé sous les ordres du général
commandant
Son épouse, Marie, habite la cité militaire des
Guineberts, proche de
La caserne Richemont
de Montluçon, construite entre 1910 et
Le 121ème régiment d'infanterie en guerre : Avant la
guerre, le 121ème RI est rattaché à la 25ème
Division d'Infanterie Motorisée commandée par le
général Molinié, rattachée elle-même à
la 13ème Région Militaire, dont le Grand Quartier
Général se trouve à Clermont-Ferrand (63). Le
régiment, commandé par le colonel Charbonnier, est en garnison
à Montluçon (03).
Lorsque guerre éclate, la
25ème DIM est complète en personnel et en
matériel auto. Mais ce dernier est en mauvais état, et on compte
un léger déficit en canons A.C. de 25 mm. La dotation en
grenades et mines antichars est incomplète. Elle est rattachée au
1er Corps d'armée, qui est intégré à la VIIème
Armée commandée par le général Giraud.
Le 10 mai 1940, le 121ème RI tient PC à Bourbourg (59), puis le lendemain 11 mai à Anvers
(Belgique). Il semblerait qu'il soit aussi passé dans la région de Bréda et de
Hoogstraeten,
aussi en Belgique. Du 10 au 18 mai le régiment participe aux combats des Bouches de l'Escaut, puis du 19 mai
au 4 juin, à la Bataille du Nord.
La bataille du Nord et la poche de Lille :
En moins de 6 semaines,
du 10 mai au 22 juin 1940, les Alliés subissent une cuisante
défaite, et l'armistice est signé le 22 à Rethondes. Hitler
a tenu à signer cet acte dans le même wagon où l'Allemagne
avait signé sa défaite de 1918, pour laver ce qu'il avait
toujours considéré comme une humiliation.
Les deux tiers de la France sont
occupés, et des dizaines de milliers de soldats, sont prisonniers, la
plupart sans avoir même combattu. L'invasion du 10 mai avait provoqué
un gigantesque exode des populations du nord
de la France vers le sud. Environ
10 millions de français, belges et hollandais
fuient les combats et les
bombardements, selon l'historien Jean-Pierre Azéma.
Entre le 26 et le 31 mai une
bataille s'engage autour de Lille (59). Trente à quarante mille hommes barrent
héroïquement la route à six divisions allemandes, dont deux
blindées sont ainsi retenues, ce qui permet le réembarquement des
forces britanniques à Dunkerque (59). Le but est de retenir le plus
longtemps possible le plus possibles d'unités allemandes, car chaque
heure passée à résister permet à des soldats
alliés de s'embarquer.
Les forces françaises se
replient donc de l'Escaut vers la Deûle, mais leur retraite est
bloquée sur ce dernier cours d'eau car les ponts sautent les uns
après les autres. On retrouve ainsi de nombreuses unités
pêle-mêle, dont le 121ème RI. Le
général Molinié, qui commande la 25ème
DIM et dirige la résistance depuis Haubourdin (59), organise une
tentative de sortie pour rejoindre Armentières en franchissant le
pont
de l'abbaye sur
Des milliers de soldats
français prennent le chemin de la captivité
jusqu'au printemps 1945 pour
La captivité : Armand Guignard est fait prisonnier le 19 juin
1940 au Bois de la Roche, sans autre précision.
Il existe un bois de la Roche
à proximité de Mont, en Belgique.
Il en existe un autre, avec château
construit par la famille de Montauban, sur la commune de
Néant-sur-Yvel,
dans le Morbihan. Enfin il existe aussi un bois de la
Roche, avec manoir et ancienne métairie, dans le canton de Sizun, dans
le Finistère. Le Morbihan et le Finistère faisaient partie de la XIème
Région Militaire. En mai-juin 1940, il y arrivait sans cesse des flots
de réfugiés civils, mais aussi des troupes françaises et belges, des
états-majors et des services, tous en retraite depuis les départements
de la région lilloise. Il faut aussi noter le présence d'unités
embarquées sous les bombes à Dunkerque du 27 mai au 4 juin, parvenues
en Angleterre, puis rembarquées pour la France à direction de
Cherbourg, dans le but de se regrouper en Normandie, ou en Bretagne, et
de reprendre le combat contre l'envahisseur.
Le 121ème RI
ayant été capturé le 31 mai dans la poche de Lille, Armand
faisait-il partie de ces prisonniers?... Avait-il été isolé de
son unité avant?... S'est-il échappé pendant qu'il partait
vers l'Allemagne via le Danemark avant d'être repris le 19 juin en
Belgique?... S'est-il replié sur la Bretgane avant d'être
de nouveau capturé?...
L'état actuel des recherches, et surtout le manque
de précisions dans les différents documents consultés, ne
permettent pas de savoir si c'est l'un de ces trois lieux, ou bien un
autre,
différent encore… où fut capturé Armand. Toute hypothèse ne serait donc
que pure conjecture!... et tel n'est pas le propos de cet article.
Ce qui est avéré, c'est qu'après
avoir transité par la caserne Lefevre à Mulhouse (Haut-Rhin) en juillet 1940
(voir fiche prisonnier page 1,
page 2), portant le n° 75202 de la
liste des prisonniers,
Armand est acheminé sur le Stalag VII A
à Moosburg (Bavière)
(voir carte), sous le
matricule 55023, liste 898/40 (page 1,
page 2), à compter du 12 août 1940.
Par la suite, selon Maria W..., Armand est envoyé dans un kommando dans le village
d'Emmering (Bavière).
Il reste pendant pratiquement toute la
durée de la guerre semble t'il à Emmering.
La fiche médicale de son
dossier de prisonnier d'Armand mentionne Furstensfelbrouck
(Munich) ST 7A. Il semble qu'il s'agit du kommando de Fürstenfeldbruck
qui accueillit des prisonniers français dans une Spanplattenfabrik
(usine de panneaux de particules) à partir de janvier 1941. Ce village
de Bavière, dont le numéro de kommando est inconnu dans l'état actuel des recherches, est
situé juste à côté d'Emmering,
et est chef-lieu de canton (voir carte).
Pour les besoins de son industrie et de son agriculture, Hitler
n'avait pas mobilisé tous les allemands. Ces hommes pouvaient rejoindre
les rangs de la Wehrmacht, mais il fallait les remplacer. Rappelons que
plus d'1 million de français furent fait prisonnier en mai et juin
1940, sans compter les autres nationalités. Le Führer décida dons de
substituer des prisonniers aux travailleurs allemands afin que ceux-ci
puissent rejoindre les rangs de l'armée. De plus ces hommes, dont l'âge
se situait entre 20 et 48 ans, ôterait à la France une partie des ses
forces vives, ce qui permettrait au Reich de mieux la dominer.
Mais il fallait du temps pour recenser les employeurs et donc le nombre
de prisonniers à leur attribuer. Ainsi les kommandos ne seront pas
constitués immédiatement. Il y en aura plus de 80 000 de moyenne et
petite importance, qui seront constitués au cours des derniers mois de
1940 ou au début de 1941.
Les prisonniers passent par des
camps de prisonniers, Stammlager ou Soldatenlager, abrégé en Stalag, où
ils sont fouillés, douchés et
désinfectés. On leur confisque leurs papiers. Les bagages sont fouillés
et on confisque au prisonnier tout objet qui pourrait favoriser une
évasion, un meurtre ou un suicide (boussole, rasoir, ciseaux, couteaux,
briquets, allumettes, bougies, ceintures, lacets, boîte ou flacon de
médicament, pinces à ongles, etc...). Chaque prisonnier
est photographié, on lui relève les empreintes digitales, et on lui
remet une petite plaque
en zinc de 6 cm sur 4, sur laquelle
est gravé le numéro matricule qui lui est attribué. Cette plaque est
percée de deux petits trous permettant de la porter en sautoir avec une
ficelle. La plaque est constituée de deux moitiés identiques séparées
par une ligne de trous, ce qui permettait en cas de décès de la briser
en deux. La partie était destinée à la famille, et la partie inférieure
pour être clouée au cercueil. Le prisonnier a
l'obligation de porter cette plaquette jour et nuit, mais surtout lors
des appels.
Plusieurs
centaines d'hommes sont hébergés dans ces camps entourés
de barbelés, dans des baraques en bois contenant 12 lits à 3
étages.
L'Allemagne en guerre ayant un grand besoin de main
d'œuvre, les prisonniers sont envoyés dans des camps de travail ou
des kommandos dispersés dans tout le pays. Un règlement strict
est appliqué dans les camps de travail, avec lever à 4 heures,
rassemblement, appel, départ pour le travail, et coucher à
19heures, après la soupe.
Les Arbeits Kommandos : Le plus grand nombre des prisonniers de
guerre, après un passage au stalag, sont envoyés dans des Arbeits
Kommandos, détachements de travail forcé, regroupant une dizaine
d'hommes, parfois plusieurs centaines, ce qui représente pour
l'Allemagne une main d'œuvre qui est utilisée pour compenser le
départ des hommes à
Dans d'autres Kommandos,
composés de seulement quelques hommes, les prisonniers sont alors
logés dans une écurie, une soupente, un bâtiment
isolé d'une ferme, ou une pièce isolée aux fenêtres
clouées et garnies de barbelés. Le soldat chargé de la
surveillance assure son service de façon beaucoup moins stricte, voire
parfois avec désinvolture…
A partir de 1942, des prisonniers
logeront chez leur employeur, certains dans des conditions pénibles,
d'autres avec tous les privilèges possibles.
Les Kommandos agricoles sont vite
considérés par les prisonniers comme de "bonnes
planques", où l'on ne souffre plus de la faim des premiers jours de
captivité. Dans ce type de Kommando, une certaine entente ou une
certaine compréhension s'est vite mise en place entre le
"bauer" allemand est le cultivateur français prisonnier. Leur
même amour de la terre permit ce rapprochement, et après un temps
d'adaptation eu égard aux méthodes d'exploitation
différentes, le français fut vite laissé seul par le
fermier allemand pour faire son travail. Et à partir de 1942, lorsque
les agriculteurs allemands seront aussi mobilisés, le prisonnier
français prendra parfois sa place dans l'exploitation. L'attitude
était bien évidemment différente lorsque le prisonnier
affecté à une exploitation n'était pas du tout du monde
agricole.
Les Kommandos industriels sont au
départ plus redoutés, bien qu'à la longue les
"tire-au-flanc" sauront en tirer parti, de même que les
saboteurs. Les horaires de travail y sont plus réguliers,
coïncidant souvent avec ceux des ouvriers allemands, et le repos
hebdomadaire y est prévu. Mais bien souvent la direction de l'entreprise
impose aux prisonniers des heures supplémentaires le dimanche. Dans
certaines entreprises, le travail est rude, parfois dangereux, minuté et
contrôlé. Il y aura parfois des ententes entre prisonniers,
gardiens et ouvriers. Dans les grandes entreprises, le travail est souvent
écrasant, effectué sous la surveillance hargneuse et continue
d'un contremaître. Ici la tentation du sabotage se fait beaucoup plus
sentir par le prisonnier qui se sent un automate. Mais elle est aussi plus
dangereuse et malgré cela, ils arriveront quand même à ralentir
la production.
Ces différentes conditions
de vie dans les Kommandos amèneront des attitudes différentes
chez les prisonniers de guerre. Ceux affectés à un Kommando se
trouvant dans une petite ville et qui y passeront toute leur captivité,
acquerront des habitudes et des libertés dans leur façon de
travailler qui seront fonction de la considération qui leur est
témoignée, générosité ou mépris…
C'est dans ce genre de Kommando que le prisonnier profite le plus des
circonstances pour améliorer leurs conditions de vie.
Mais les conditions de vie ne
sont pas les même dans les grandes fermes employant plusieurs
équipes, et la petite ferme n'employant qu'un prisonnier. Il en sera de
même dans une grande ville, une petite ville ou une usine isolée. Surtout
si le prisonnier est employé dans sa profession ou non. La vie en
captivité et l'attitude de la population est aussi différente
selon les régions : Prusse, Autriche, régions
frontalières, Bavière, etc,…
Ainsi dans certaines
régions les prisonniers ont-ils pu obtenir plus ou moins rapidement
certaines libertés, telles l'autorisation de visite d'un Kommando
à un autre, l'autorisation d'entrer et consommer dans les débits
de boissons, d'acheter dans certains magasins avec l'argent du camp. Mais pour
d'autres, pendant toute la durée de la captivité la surveillance
est demeurée étroite avec remise obligatoire de ses chaussures et
des principaux effets d'habillement chaque soir à leurs gardiens. Une
nouvelle affectation d'un contremaître ou d'un gardien peu faire aussi
évoluer les conditions de vie des prisonniers. Et ne parlons pas des
évasions ou des fouillent pendant lesquels des objets interdits sont
trouvés, qui modifie les rapports entre gardiens et prisonniers.
La rencontre : Sur la carte d’examen médical de
réfugié, pour le lieu de Détention, il est noté Furstenfelbrouck (Munich) ST. 7A. Il
s’agit de la commune de Fürstenfeldbruck, située sur
C'est donc dans son Kommando à
Emmering qu'Armand fait la connaissance d'une
jeune serveuse, Maria W..., travaillant dans une auberge familiale du village, la Gasthof Grätz.
C'était une jeune paysanne d'origine polonaise qui, bien que de
condition modeste, n'était pas non plus stupide. Selon cette Maria,
Armand travaillait
comme bûcheron. Mais c'était un homme mystérieux. Elle disait qu'il
travaillait
pour le gouvernement de Vichy, mais plutôt du côté
"français", peut-être comme un agent double. La personne qui
leur servait d'interprète disait à Maria qu'elle n'avait pas
idée de qui elle avait affaire.
Toujours est-il que cette rencontre déboucha
sur une histoire d'amour, qui se concrétisa par la naissance d'un garçon
en 1945, lequel fut prénommé Armand, comme son père
français. Lorsque la guerre se termine et
que les prisonniers son libérés, avant de regagner la France,
Armand laisse à Maria une adresse à Paris, afin qu'elle vienne le
rejoindre avec son enfant.
L'amour que maria éprouve
pour Armand n'étant peut-être pas assez fort, et toute sa famille se
trouvant en Pologne, Maria préfère regagner son pays natal. Par
la suite, avec la mise en place du régime communiste et la fermeture des
frontières, il lui fut probablement impossible de rejoindre Armand en
France, même si elle le désirait.
Maria élèvera alors
seule son enfant, sur l'origine duquel les villageois
"spéculaient" quant à son origine. Il avait en effet le
teint mat, les cheveux et les yeux bruns, et une forme de visage peu habituelle
pour un polonais. Il avait un type méditerranéen prononcé.
Son aspect physique et le fait d'être un enfant illégitime ont
toujours été pour cet enfant un fardeau à porter. Surtout
que sa mère ne lui révéla son histoire, qu'elle avait
toujours cachée jusqu'alors, que lorsqu'il fut âgé de 45
ans.
A Emmering, dans
Hauptstrasse, au n° 13, existe depuis 1874
une auberge sous le nom de Gasthof
Grätz. Elle fut créée par Thomas Grätz, puis passa
à son fils Leonhart et sa femme Therese. Le plus jeune de leurs 12
enfants, Franz, premier du nom et sa femme Maria, reprirent l’affaire
familiale en 1937. Leur fils Franz, deuxième du nom, et sa femme Isolde
transformeront l’auberge de village en ce qu’elle est
aujourd’hui. L’auberge
est tenue depuis 1994 par Franz,
troisième du nom et sa femme Karin,
qui sont la 5ème génération de la famille à tenir cet établissement.
Le retour du prisonnier : Rapatrié le 5 juillet 1945 par le
centre de Mulhouse (fiche n° 1094616), il est démobilisé le
17 juillet 1945, selon un rapport du 4ème peloton de
Gendarmerie de l'Allier.
Rappelons que la plan final de
rapatriement du Ministère des Prisonniers Déportés et
Réfugiés, qui devait être mis en place lors de
l’arrêt des hostilités consécutif à la
reddition de l’Allemagne, prévoyait que les prisonniers de guerre
à leur arrivée en France, devaient être soumis à une
série de formalités dans des « Centres
Frontaliers » ou « centres d’Accueil ».
Cette procédure comprenait des contrôles de
sécurité, un examen sanitaire, des opérations d’épouillage,
l’obtention de papiers d’identité, la remise d’une
somme d’argent et de provisions. Le prisonnier devait ensuite regagner le
plus vite possible son domicile et finir lui-même les formalités
administratives (démobilisation, obtention du pécule,…)
auprès des autorités de sa région. Mais la
libération des prisonniers aura en définitive, des formes aussi
variées que pouvait l’être la captivité.
Armand est affecté au CCT (Centre
de Commandement des Transmissions) n° 113, annexe de Montluçon le 17
août, à l'issue de sa permission de rapatriement. Il est ensuite
affecté au CORT (Centre Opérationnel de Répartition des
Transmissions) 113 le 12 septembre, et affecté à la CHR
(Compagnie Hors Rang) le même jour. Armand est admis à faire
valoir ses droits à la retraite proportionnelle à compter du 24
novembre 1945, avec une pension d'invalidité de 10 % pour
captivité. Rayé des Cadres le 24 novembre 1945, il est maintenu
en service armé le 11 janvier 1946 par le Centre de Recrutement de
Clermont-Ferrand, dans le Puy-de-Dôme.
La reprise de la vie conjugale et
familiale des prisonniers rapatriés fut l’occasion de nombreux
drames. Ces hommes étaient en effet souvent jeunes (90% de moins de 36
ans et 60% de moins de 30 ans), car nombre de pères de famille nombreuse
furent libérés par les allemands pendant
Des couples se
désintégrèrent pendant la captivité et
l’abandon du prisonnier par son épouse, ou
l’infidélité de celle-ci furent la cause de drames
personnels aigus : découverte de l’infidélité
de l’épouse, femme ayant refait sa vie et attendant le mari
uniquement pour divorcer, maisons vides et patrimoine disparu… Ce genre
de drame personnel ne concerna cependant qu’une minorité des
prisonniers rapatriés.
De plus, la pensée de
laisser l’épouse seule au milieu des difficultés matérielles,
dans des conditions de vie difficiles, pouvaient entrainer chez le prisonnier
un besoin de compagnie, de soutien moral, voire d’affection…
Le Commissaire
Général aux Prisonniers de Guerre Maurice Pinot
écrivait : On accueillait
souvent les anciens prisonniers de guerre comme des intrus, comme des
gêneurs, avec lesquels il fallait partager les espoirs
raréfiés et des biens en quantité insuffisante. On les
considérait comme des malchanceux, comme des malhabiles, qui n’avaient
pas su se débrouiller pour échapper à
Même si le nombre de
divorces augmenta sensiblement après guerre, la grande majorité
des prisonniers de guerre reprirent leur vie familiale et conjugale, la plupart
ayant envie de renouer avec le passé, et préférant parfois
laisser de côté ce qui c’était passé pendant
leur captivité. Aussi bien l’infidélité d’une
épouse livrée à elle-même pour survivre seule et
élever les enfants, que pour eux-mêmes qui avaient besoin de
compagnie et d’affection pour supporter
Armand est
décédé le 17 décembre 1983,
aux Ombrages, 30 avenue
de la République à Crosne (Essonne). Son acte de
décès mentionne qu'il est l'époux de Marie Louise Germaine
Lafond, domiciliée à La Courneuve (Seine-Saint-Denis), au 9
avenue Maréchal Cachin. La déclaration de décès est
faite par Michel Gourlin, le sous-directeur des Ombrages.
Liens :
-- www.guillerm-statlag11b.fr, site de Magali consacré à qes recherches personnelles sur le parcours de son père mobilisé puis prisonnier de guerre.
Sources :
-- Archives de Paris,
état-civil 4E9355, et registres matricules militaires.
-- Archives de la Vienne,
état-civil de Chabournay 9E59/10,
-- Courriels d'Ewa Robinson
de 2006 et 2008,
-- Bureau des Archives des
Victimes des Conflits Contemporains, dossier de prisonnier,
-- Archies du Service Historique de la Défense à Vincennes, cote 34N125.
-- Les Grandes Unités
Françaises, historiques succincts, par le Ministère des
Armée, l'Etat-Major de l'Armé de Terre et le Service historique,
Imprimerie Nationale, 1967, tomes 1 et 2,
-- Le Retour des Prisonniers
de Guerre Français, par Christophe Lewin, Publications de la Sorbonne,
Paris, 1986,
-- Pétain et les
Français 1940-1951, par Michèle Cointet, Editions Perrin, Paris,
2002, page 243,
-- Les Prisonniers de Guerre
dans les Stalags, les Oflags et les Kommandos 1939-1945, par Yves Durand,
Editions Hachette,
-- Les Flammes du Purgatoire, Histoire des prisonniers de 1940, par Robert Christophe, Editions France-Empire, Paris, 1979,
-- Encyclopédie en
ligne Wikipedia,
-- Page Internet du stalag
sur le site Histoire-en-question http://juin1940.free.fr/stalag.htm,
-- Page Internet du Stalag
VII A http://www.moosburg.org,
-- Site Les Prisons de Loos à travers
-- Page internet http://cc-mauron-broceliande.com/wiki/index.php5?title=Bois_de_la_Roche,
-- Page internet http://patrimoine.region-bretagne.fr,
-- Page internet http://fr.topic-topos.com/,
-- Page internet Bons et mauvais kommandos sur le site http://www.histoire-en-questions.fr,
-- Forum sur l'armée
française en 1940 http://www.atf40.fr
pour le groupement Molinié,
-- Page
Internet http://france1940.free.fr pour l'ordre de bataille du 10 mai 1940,
-- Pages Internet http://cmapl.pagesperso-orange.fr/chaudron_lille.html,
http://home.nordnet.fr/~jdujardin/haubourdin/gbataille.htm,
et le Blog du 14ème régiment de Zouaves pour la Poche
de Lille.
Crédits
photographiques :
-- Google maps (Bois de la
Roche à Mont en Belgique),
-- Bureau des Archives des
Victimes des Conflits Contemporains (dossier de prisonnier),
-- CPA sur le site
Delcampe.com (les Ombrages, Chabournay),
-- Page internet http://cc-mauron-broceliande.com/wiki/index.php5?title=Bois_de_la_Roche
(Bois de la Roche façade nord),
-- Page internet http://fr.topic-topos.com/
(porche et pavillon d'entrée du château du Bois de la Roche),
-- Blog du 14ème
régiment de Zouaves http://14emeregimentdezouaves.over-blog.com/article-31-05-1940-redition-de-la-poche-de-lille-106133054.html
(défilé dans Lille),
-- Page Internet http://cmapl.pagesperso-orange.fr/chaudron_lille.html
(Pont de l'Abbaye),
-- Page Internet http://home.nordnet.fr/~jdujardin/haubourdin/gbataille.htm
(signature capitulation par Molinié et Waeger),
-- Pages Internet Google
images (photos d'Emmering et Moosburg),
-- Page Internet http://fr.m.wikipedia.org/wiki/Bataille_de_France
(photos exode et prisonniers dans le Nord),
-- Page Internet http://secondeguerre.tableau-noir.net/exode.html
(photo exode),
-- Page Internet du stalag
sur le site Histoire-en-question (photo d'un stalag),
-- Page Internet du forum http://www.hoogstraeten.be
(photo de soldats attribués au 121ème RI),
-- Page Internet de
Mémoire des Hommes (photo de la guerre du Rif),
-- Page Internet le Vieux
Maroc http://www.levieuxmaroc.com/CasablancaParcLyautey%203.html
(photos caserne 1er Zouaves à Casablanca).
-- Page Internet de
l’auberge Grätz, http://www.gasthof-graetz.de,
à Emmering (photos de l’auberge),
-- Page Internet
L’Europe vue du ciel (photo quartier Guineberts Montluçon),
-- Page http://134promo89.free.fr/ (photo caserne
Richemont Montluçon),
-- Page http://www.nos-racines.fr/guefangue/index.php
(photo fond page et illustration),
-- Page http://www.genealexis.fr/cartes-postales/stalag_7A.php (photo plaque matricule et entrée stalag VIIA)
-- Page http://www.moosburg.org/info/stalag/faynotfra.html
(photo commando agricole)
-- Page http://www.ahgz.de/regional-und-lokal/zwei-bleiben-ihrem-gasthof-treu,200012217495.html (photo Franz et Karine Grätz).
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