Le Tage termine son armement le 7 décembre 1876,
est mis en rade le 9 afin de régler ses compas et quitte Cherbourg
(un
article du 13 décembre
donne la composition de son état-major) le 14 décembre, ayant chargé 13 déportés de la Commune, qui provenaient
du dépôt spécial de Saint-Brieuc. Le navire fait relâche en rade de l'île
d'Aix le 21 décembre, afin d'embarquer des forçats destinés au bagne de
Nouvelle-Calédonie. Le navire quitte l'île d'Aix le 28
décembre 1876, transportant 1058 personnes, à savoir 405 membres
d'équipage, 400 transportés dont 7 décèderont au cours du voyage, 34
surveillants, 154 militaires (dont l'enseigne de vaisseau Amelot, qui doit embarquer au choix sur la goélette
la
Gazelle à Nouméa, et l'enseigne de vaisseau Masseron, désigné pour embarquer
au choix sur
la mésange à Tahiti), 52 passagers civils
(dont l'aide-commissaire Filâtre de Longchamps, destiné à l'aviso le
Curieux
en Nouvelle-Calédonie, le sous-commissaire du Mesnil et l'aide-commissaire de Saint-Pern, du
cadre colonial, et l'aspirant de 1ère classe Girard la Barcerie), et 1es 13 déportés.
Après une escale à Ténériffe du 22 au 27 janvier 1877, il arrive à Nouméa le 22 avril
1877, après 115 jours de mer.
Parmi les déportés, la plupart était des condamnés par contumace après l'insurrection de 1871.
Comme dans presque tous les derniers convois, un certain nombre de déportés auraient dû partir plus tôt,
mais avaient vu leur départ différé pour raison de santé.
Le
17 mai 1877, le Tage quitte Nouméa, emportant 140
rapatriés (5 libérés, 2 rapatriés pour révision de jugement, 129 dont la peine est commuée en
détention, 1 dont la peine est commuée en réclusion, et 3 dont la peine est commuée en
bannissement).
François Camille CRON,
arrivé à l'îledes Pins le 9 janvier 1875, fera partie de ce voyage, sa
peine ayant été commuée le 10 novembre 1876 en 10 ans de bannissement,
mais il devait d'abord regagner la Métropole pour que cette nouvelle
mesure soit mise à exécution. Quant à l'ébéniste Joachim Léon FROT, dont la peine
avait été commuée le 19 décembre 1876 en 8 ans de détention, et qui revenait effectuer sa nouvelle peine en
Métropole, décèdera en mer le 9 juin 1877. D'après un document du Service Historique
de la Défense à Brest (2A164), à l'arrivée du navire,
une somme de 2,45 Fr.,
trouvée dans ses effets fut versée à la caisse des gens de mer.
Après une escale à Tahiti du 12 au 25 juin, le Tage fait retour et mouille le 7
octobre 1877 dans la matinée en rade de Brest. Il est procédé à son désarment.
Liste des
Condamnés à la déportation en enceinte
fortifiée : Fernand Isidore BRUYERE, Alfredo
Ambrosio CONSTANCIA, Henri Adolphe FARROUCH, Victor Denise Sulpice
FOULOI, Louis Etienne JALABERT, Marie Charles MAUSSIRE, Charles
Philippe POUSSOT, et Etienne VIANO.
Liste des
condamnés à la déportation simple
: Amédée ADAMY, Léon GELHAYE, Louis LEDRU,
Jean
Jacques MARIE, et Charles Constant MONNIER.
(Pour tout renseignement concernant ces prisonniers, vous pouvez me
contacter ici). Pour les communards originaires du Finistère,
vous pouvez consulter le site de Patrick Milan,
pour ceux originaires d'Arcueil (Val-de-Marne), vous pouvez consulter le site
d'Annie Thauront,
avec également un article sur le député de la
Guadeloupe Melvil-Bloncourt,
condamné à mort pour sa participation à la Commune.
![](tage_maquette.jpg)
Le Tage après avoir débarqué deux nouveaux
"chargements" de forçats destinés au bagne, participera
de nouveau au rapatriement des Communards graciés ou amnistiés. Le 28
octobre 1878, il quittera
Nouméa, et arrivera à Brest le 12 février
1879 (ou le 15 selon les sources), ramenant vers la France 108 déportés (ou 120 selon les sources), dont 3
libérés, 2 graciés, 1 dont la peine est
commuée en 10 ans de détention, 3 dont la peine est
commuée en 8 ans de détention, 1 dont la peine est
commuée en 7ans 1/2 de détention, 90 dont la peine est
commuée en 7 ans de détention, 1 dont la peine est
commuée en 6 ans de détention, et 7 dont la peine est
commuée en bannissement.
Parmi les commués il y a Jean-Baptiste Trillaud, ou
Trilliaud, né le 25 mai 1839 à Moutier-Malcard dans la Creuse, garde
du Génie au 132ème bataillon de la garde Nationale puis dans le Génie
auxiliaire, condamné le 16 mai 1872 par le 4ème Conseil de
Guerre, à la déportation simple et à la dégradation civique. Son
pourvoi en cassation fut rejeté le 1er août 1872. arrivé en Nouvelle-Calédonie avec le èème convoi sur la Virginie, il fut d'abord
autorisé à résider à Nouméa, puis fut dirigé sur Uraï, où il planta du
café. Mais il fut jugé déméritant pour paresse et mauvais vouloir, et fut tranféré à Ducos. Sa peine fut commuée en 1878 en 7 ans de détention, et il rantra par le Tage en octobre 1878 pour subir sa nouvelle peine qui fut remise en 1879.
Arrivé à Nouméa le 21 mars 1880, après avoir débarqué ses prisonniers, le Tage quitte Nouméa le
6 avril (ou le 12 selon les sources).
Il ramène à son bord 80 déportés, graciés ou dont la peine est
commuée (200 selon une autre source qui donne une liste partielle), et 40 transportés non identifiés.
Sous les ordres du commandant Cobet, le navire est signalé à Sainte-Hélène le 10 juin (ou
le 15 selon les sources). En arrivant à Brest les amnistiés sont
maintenu à bord, suite à l'ouverture d'une instruction judiciaire, pour
l'assassinat de l'un d'entre eux, selon l'
Union Républicaine de Brest.
Cependant, le Tage mouille en rade de Brest, et le contingent de 120 amnistiés est débarqué
le
1er août 1880, dont 115 partent sur Paris.
Les amnistiés feront parler d'eux par des
manifestations à leur arrivée le lendemain en gare de Montparnasse, par le train de onze heures du matin,
où ils sont accueillis par le comité "Louis Blanc", et
où un des orateurs déclarera : "Pendant 8 années
d'angoisse, ils ont eu le temps de se refaire des ongles, des dents et
de la haine..." (La vie quotidienne en
Nouvelle-Calédonie de 1850 à nos jours, page 80).
Le Tage a rapatrié d'autres déportés en 1881, d'après un article du journal
l'Intransigeant du
22 mai 1881.
Il ramène également les 32ème et 34ème compagnie du 2ème régiment
d'Infanterie de Marine, et la 33ème compagnie du 3ème régiment, en plus
des passagers (liste partielle), Ces amnistiés avaient été retenus en
Nouvelle-Calédonie par des intérêts particuliers.
Sources
:
-
Déportés et forçats de la Commune : de Belleville
à Nouméa, par Roger Pérennès,
Nantes, Ouest Editions, 1991.
- Site Internet http://www.dossiersmarine.fr.
- Dossiers des navires au Centre des Archives d'Outre-Mer à Aix-en-Provence, série H30.
- Service Historique de la Défense à Brest 2F17 (Informations envoyées par Yannick Lageat).
- La vie quotidienne en Nouvelle-Calédonie de 1850 à nos jours, par Jacqueline Sénès, Hachette, 1985.
- L'Intransigeant du 22 mai 1881.
- La Dépêche du 3 août 1880.
- Le Petit Journal des 3, 4 et 5 août 1880.
- L'Histoire de la Nouvelle-Calédonie, par Christiane Terrier.
- Encyclopédie en ligne Wikimonde.
- Des oubliés de l'Histoire : les communards en Nouvelle-Calédonie, par Yannick Lageat, 2022.
- Les Tablettes des Deux Charentes de décembre 1876 à janvier 1884.
- Courriels de Pierre Quenée d'avril 2024.
- Courriels de Dominique Perruchon de mai 2024.
Crédits
photographiques :
-
Déportés et forçats de la Commune : de Belleville à Nouméa, par Roger Pérennès, Nantes, Ouest Editions, 1991.
- Numérisations archives par Bernard Guinard.
- Photos envoyées par Claude Millé.
- L'Histoire de la Nouvelle-Calédonie, par Christiane Terrier (le Tage navire-prison).